Posted in De bonne heure et de bonne humeur
Après j’arrête avec Daphné du Maurier
Comme j’atteins les limites de ma dernière obsession en date (Daphné du Maurier), et aussi parce qu’il faut que je ramène les livres à la bibliothèque avant ce soir 19h, il est plus que temps de faire le bilan :
L’auberge de la Jamaïque :
j’ai tout dit dans cet article.
Ma cousine Rachel :
Acheté suite à l’enthousiasme suscité par L’auberge de la Jamaïque, ce deuxième (enfin troisième si on compte Rébecca, lu il y a longtemps maintenant) m’a légèrement moins enthousiasmé. Le passage en Italie est réjouissant d’angoisse (je vais y revenir), la suite de l’histoire, la chute lente du héros et la montée du doute m’ont moins convaincue que l‘Auberge de la Jamaïque. Mes attentes étaient hautes, et ça reste néanmoins un bon bouquin.
Mad :
Etrange livre que ce Mad, dernier livre écrit par une Daphné du Maurier de pas loin de 70 ans. A notre époque (enfin les années 70 j’imagine), le Royaume-Uni est sorti du marché commun et se retrouve « envahi » en douceur par les américains, soit disant pour les défendre contre un péril que je n’ai pas bien compris (une guerre civile ?). En Cornouailles, une vieille dame (Mad), sa petite fille et ses six garçons adoptifs ne se laissent pas faire.
Je me suis demandé ce que Daphné du Maurier cherchait à dire ici. J’ai eu du mal à retrouver ses thèmes habituels (pas de d’univers angoissant comme dans les livres précédents) une héroïne (la petite fille de Mad) hésitante, un peu trop sérieuse pour être amusante, falote contrairement à ses autres héroïnes, écrasée par le caractère de sa grand-mère et son rôle de petite maman: il m’a fallu un voyage en train pour arriver à venir à bout du bouquin.
La coïncidence a voulu que j’enchaîne avec le Général du Roi, pour me rendre compte que Daphné nous racontait la même histoire (la Cornouailles envahie, des laisser-passer pour pouvoir circuler, une résistance locale contre un envahisseurs), célébration de l’esprit Cornouillais et triomphe de la langue locale.
Perplexe je reste, pas le meilleur Du Maurier à mes yeux, mais j’aimerai lire une critique plus éclairée que la mienne.
Le général du Roi :
Je vous le dis tout de suite, Honor Harris de Lanreust et Richard Grenville sont entrés directement dans le top 5 de mes couples préférés de la littérature. (si tant est que j’ai un top 5 de ce genre).
Non que Richard Grenville soit vraiment sympathique, mais la modernité de leur relation, permise par la situation particulière de l’héroïne, situation qui la dégage des obligations morales de son époque (enfin ça et son sacré caractère) est assez jouissive.
Le portrait de la femme et du couple éclipse un peu l’intrigue que nous vend le prologue, à tel point que je l’avais oublié quand elle ressurgit à la fin du roman.
Je ne sais pas dans quelle mesure ce roman s’appuie sur des faits réels, ce qu’il en a été de la vie d’Honor et du Général du Roi, mais ce roman est un de mes préférés de l’auteur.
Par contre, pour les gens ignorants comme moi, pensez à jeter un coup d’oeil sur la page wikipédia de la guerre civile anglaise (ça se passe pendant la seconde guerre civile).
Les Oiseaux :
Oubliez le film d’Hitchcock, qui s’est juste appuyé sur l’idée de base pour construire un film personnel, Les Oiseaux de Daphné du Maurier raconte l’histoire d’une simple famille cornouaillaise face à une invasion d’oiseaux.
Vous voyez un histoire de zombies ? Et bien pareil avec des oiseaux. (Et je dis pas ça seulement parce que j’ai vu La nuit des morts-vivants la semaine dernière)
Une trentaine de page, toujours diablement bien écrites.
Le Monde Infernal de Branwell Brontë :
Un livre un peu à part puisqu’il s’agit de la biographie du frère des vous-savez-qui.
Enfant sensible, clairement trop protégé par un père inquiet, l’auteur propose ici sa vision de l’homme, et avance des thèses parfois en contradiction avec d’autres biographes.
Clairement, je ne lirai plus un livre par tranche de quinze minutes de tram.
Le bouc émissaire :
Un britannique professeur de français se retrouve par hasard à la tête d’une famille française des années 50. Ayant échangé sa place avec son sosie, il avance à l’aveugle parmi sa famille, la verrerie familiale, et les secrets de son double.
Intriguant parce qu’on comprend en même temps que le héros du livre, troublant parce qu’on se retrouve renvoyé aux deux faces (la bonne et la mauvaise) de chaque personnage, j’aurai du mal à dire si ce ce roman dépeint correctement la vie de bourgeois de province des années 50.
Ca se lit bien, mais ce n’est pas non plus mon préféré.
Ne regarde pas tout de suite, Les verres bleus, L’alibi, Le pommier, Pas après minuit :
Nouvelles fantastiques, à tendance macabre, (le surnaturel n’intervenant jamais pour pour apporter la joie et le bonheur), elles ne dépareraient pas à côté du Horla ou de certaines nouvelles de Poe.
Au premier abord on peut s’étonner de voir Daphné du Maurier dans cette thématique, et puis il suffit de se souvenir des descriptions de Rébecca, de L’auberge de la Jamaïque, ou de la partie italienne (<3) de Ma Cousine Rachel pour se rendre compte que c’est une composante essentielle de cette auteur.
Je recommande, sauf si vous êtes un peu sensibles, mais bon, c’est pas Lovecraft non plus (Lovecraft me fait très peur).
En conclusion
J’ai beaucoup lu le mot « Gothique » pour qualifier les romans de Daphné du Maurier, mais comme je ne sais pas très bien ce qu’il recouvre, je m’abstiendrais de l’employer. A la lecture de tous ces romans, on retrouve effectivement une thématique « étrange » et « semi-surnaturelle » (qui s’applique aussi très bien à l’univers de la famille Brontë), et quelques traits bien senties sur la place des femmes dans la société. Ce qui m’amène à mon dernier point.
J’ai repensé à la collection « Un siècle d’écrivains » (une collection de documentaires sur les écrivains du Xxème siècle dirigé par feu Bernard Rapp), et je me suis dit que peut-être, il y en aurait un consacré à ma nouvelle auteur préférée.
J’ai regardé la liste, Daphné du Maurier n’a pas eu les honneurs d’un documentaire.
Ensuite, je me suis rendue compte que sur les 257 épisodes de la collection, six (6) ont été consacrés à des femmes.
Six.
Ca fait 2,3 %.
Il faut croire que le Xxème siècle a été masculin, littérairement parlant.